Pendant une grande partie de sa vingtaine, Caster Semenya s’est sentie physiquement malade. La coureuse sud-africaine a connu une soudaine renommée mondiale en 2009, lorsqu’elle a remporté l’or au 800 m aux Championnats du monde d’athlétisme de Berlin, à l’âge de 18 ans seulement. Il s’agissait de sa première grande compétition mondiale, mais sa victoire a été entachée de questions liées à son sexe et à son genre. Compte tenu de sa vitesse, de sa musculature et de sa voix rauque, certains lui ont demandé discrètement si elle était un homme, l’instance dirigeante du sport, l’IAAF (connue depuis 2019 sous le nom de World Athletics), avait demandé à Semenya de passer des tests de vérification de genre la veille de la course, un porte-parole déclarant à la presse que « les rumeurs, les ragots commençaient à s’accumuler » et nécessitait une enquête.
La victoire ultérieure de Semenya marquerait le début d’une décennie pleine de rebondissements qui la mènerait de la plus haute marche du podium des championnats du monde à la Cour européenne des droits de l’homme – et mènerait à une bataille déterminante pour sa carrière entre les coureuse et World Athletics sur son droit de concourir, ainsi qu’un plan de traitement médical surveillé qui lui donnerait le sentiment, comme elle me le dit aujourd’hui, « comme une morte-vivante », deux séries de résultats de tests ont été divulgués dans les mois qui ont suivi les championnats de Berlin : des analyses de sang auraient montré que Semenya avait trois fois plus de testostérone dans son organisme que la moyenne des femmes. Ensuite, les résultats de ses examens médicaux ont été publiés dans des journaux australiens, suggérant que Semenya était une « hermaphrodite » avec des testicules internes et pas d’utérus. Après 11 mois d’incertitude, l’IAAF a annoncé en juillet 2010 avoir convenu d’un « processus » avec Semenya, pour lui permettre de concourir au niveau élite (elle n’avait plus pu courir de course depuis août 2009 mais l’avait gardée sa première médaille d’or.